> Quatrième de couverture <
1969 : Albert Speer, architecte favori et Ministre de l’armement d’Hitler, publie ses Mémoires. Revisitant son passé, de ses mises en scène des congrès nazis à la chute du Reich, il parachève l’ultime métamorphose qui a sauvé sa tête au procès de Nuremberg et va faire de lui la star de la culpabilité allemande. Affirmant n’avoir rien su de la Solution Finale, il se déclare “responsable, mais pas coupable.” Les historiens auront beau démontrer qu’il a menti, sa version de lui-même s’imposera toujours.
Comment écrire sur un homme qui a rendu la fiction plus séduisante que la vérité ?
A l’heure des fake news et de la guerre des récits, voici le roman d’un des plus grands mensonges de l’Histoire. Traquant les scènes de la vie de Speer, s’interrogeant sur leur vraisemblance, éclairant certains aspects, allant là où il s’arrête en convoquant les acteurs capitaux d’après guerre, notamment l’historienne Gitta Sereny, l’auteur propose une lecture vertigineuse de celui à qui l’un de ses collaborateurs affirmait : « Savez-vous ce que vous êtes ? Vous êtes l’amour malheureux du Führer ».
- Spécificités -
* Editions originales : Editions Grasset
* Date de parution originale : 28/08/2024
* Nombre de pages : 272
« Vous êtes l’amour malheureux du Führer » est la phrase qu’un des collaborateurs d’Albert Speer, Karl Maria Hettlage, lui lança suite à la très forte relation intimiste qui le liait à Adolf Hitler, bien avant le début de la Seconde Guerre Mondiale.
Ce Karl Maria Hettlage, officier SS, juriste, a été chargé de l’expulsion des Juifs de Berlin (autant dire leur mort) pour la construction de futurs bâtiments. Après la guerre, il devint secrétaire d’Etat aux Finances de la RFA où, ironiquement, il gérera les dossiers d’indemnisation des victimes d’expériences médicales dans les blocs d’expérimentation des camps de la mort.
Albert Speer, lui, fut un des favoris du cercle restreint des intimes du Führer au même titre que Goering ou Himmler. Issu d’une famille bourgeoise, son grand-père et son père eux-mêmes architectes, il se vit confié par Hitler son projet mégalomane d’une avenue pharaonique à Berlin, à la gloire du Troisième Reich.
Il devint par la suite ministre de l’Armement durant la guerre. Malgré cette haute fonction, il prétendit, lors du procès de Nuremberg, ne rien savoir quant à la Solution finale, ce qui lui permit d’échapper à la peine de mort. Il se déclara « responsable, mais pas coupable ». Condamné à « seulement » 20 ans d’emprisonnement pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, il maintint ce discours dans ses mémoires, parues en 1969, sous le titre, « Au cœur du Troisième Reich », qui fut un best-seller en Allemagne.
Ce positionnement a été, à maintes reprises, démenti par plusieurs historiens. Pourtant, Albert Speer devint une star invitée sur de nombreux plateaux télé. L’auteur Jean-Noël Orengo revient sur cette mascarade orchestrée par l’un des plus grands menteurs que le monde eut connus.
Revenant sur ces « fameuses » mémoires, Jean-Noël Orengo met en exergue ces éléments démontrant de nombreuses élucubrations, invraisemblances et enjolivements de la réalité et ce, sans jugement. Ce bouquin, très bien documenté et étayé, livre une autre version de l’Histoire que celle édulcorée du principal protagoniste, Albert Speer.
Ce livre n’est pas une biographie romancée classique et c’est cela qui en fait sa richesse. Mettant d’abord l’accent sur cette relation hautement ambiguë à de nombreux égards entre Hitler et Speer, c’est également la démonstration des mensonges et omissions (étayés par les archives) de Speer qu’il tint aussi dans ses mémoires, où le « fake » est roi et est une réécriture de sa vie.
Finalement, ce récit historique s’apparente aux meilleurs essais sur le sujet et nous offre de manière fascinante tous les éléments pour mieux comprendre un des plus grands mensonges de l’Histoire.
Lu pour le site 20minutes.fr