> Quatrième de couverture <
Nous sommes en 1997.
Après avoir passé quelques années à l’écart pour se faire oublier, loin de Londres et du bruit du monde, Tomás Nevinson accepte une nouvelle mission et redevient un agent des services secrets britanniques.
Il doit se rendre dans une ville du nord-ouest de l’Espagne pour identifier et neutraliser une femme originaire d’Irlande du Nord qui s’y cacherait sous les traits de trois personnes différentes. On sait qu’elle est rusée et dangereuse ; on sait que son nom est associé à des attentats sanglants de l’IRA et de l’ETA, et qu’elle pourrait, elle aussi, reprendre du service à tout moment si l’une des organisations terroristes le lui demandait.
Tomás Nevinson va devoir la confondre, mais la tâche ne sera pas aisée, car s’immiscer dans la vie d’autrui n’est pas sans risques, surtout quand on ignore jusqu’où cela peut nous entraîner.
> Spécificités < - Editions originales : Editions Gallimard - Date de parution : 01/12/2022 - Nombre de pages : 727 - Traduit de l'espagnol par Marie-Odile Fortier-Masek
Si je devais résumer ce livre en un seul mot, je dirais « talentueux » tout simplement !
Voilà ma première immersion dans l’univers de Javier Marías et pourtant, je débute par sa dernière œuvre, publiée – en français – quelques mois après son décès dans sa ville natale de Madrid, des suites d’une pneumonie.
« Tomás Nevinson » est le second tome d’un diptyque consacré à un agent secret, mi-espagnol, mi-britannique du même nom. Ici, c’est la vie de cet agent du MI5 qui est contée par le principal intéressé. Après avoir pris sa « pension », il est recontacté par son ancien supérieur pour une dernière mission un peu spéciale. Il s’agit de retrouver une femme, membre active de l’IRA qui serait impliquée dans plusieurs attentats de l’ETA mais dont personne n’a jamais su mettre de visage. Pour cela, il devra faire la connaissance de trois jeunes femmes dont l’une d’entre elles serait la terroriste.
Javier Marías, ce n’était pas seulement un écrivain, mais aussi un conteur hors pair. En plus de 700 pages, il parvenait à happer son lecteur dans tout un univers, mêlant des faits réels à de la fiction. Tout semblait tellement cohérent dans ses écrits que le lecteur se perd et se demande où est la frontière avec le réel et finalement, ne raconte-t-il pas un brin de sa propre histoire ?
C’est le genre de livre qu’on souhaite doucement savourer, tournant pianissimo les pages, sans se presser dans un moment hors du temps. Ce n’est pas le livre qu’on s’empresse de lire en deux temps deux mouvements, au risque de passer à côté de beaucoup de choses.
Doté d’un style d’écriture tout à fait singulier, Javier Marías offre un très grand roman dans lequel il multiplie les considérables digressions par la voix de son héros. Malgré qu’elles puissent sembler démesurées, leurs pertinences apparaissent ensuite aux lecteurs. Il est évident que l’auteur maniait parfaitement sa plume, par un travail de recherches conséquents en amont. Son talent tend à s’exprimer notamment par l’utilisation du pronom « je » pour les réflexions de son principal protagoniste qui se mue, ensuite, en « il » pour ses actions.
Le premier tome était paru en 2019 et s’intitulait « Berta Isla » du nom de l’épouse de Tomás Nevinson. Il n’est pas nécessaire de lire les deux tomes dans l’ordre. Mais après avoir découvert « Tomás Nevinson », vous aurez sûrement, tout comme moi, envie de vous plonger dans le second.
Il est triste à penser que l’Espagne a définitivement perdu l’une de ses plumes majeures du XX-XXIème siècle.
Lu pour le Prix Bookstagram du Roman Etranger.
« La littérature nous permet de voir les êtres tels qu’ils sont, bien qu’il s’agisse là de gens qui n’existent pas ou qui, osons l’espérer, existeront pour toujours, si bien qu’elle ne perdra jamais complètement son prestige« .