> Quatrième de couverture <
Quand la police de Moscou est arrivée, les trois soeurs étaient assises le long du mur à côté du cadavre de leur père.
Il avait le poil noir, le ventre gras, une croix dorée autour du cou.
Depuis des années, il s’en prenait à elles, les insultait, les frappait, la nuit, le jour.
Alors elles l’ont tué.
La Russie s’est déchirée à propos de ce crime, parce qu’il lui renvoie son image, celle d’une violence domestique impunie.
À vingt ans, Laura Poggioli a vécu à Moscou. Elle aimait tout : la sonorité de la langue, boire et sortir, chanter du rock. Elle a rencontré Mitia, son grand amour. Parfois il lui donnait des coups, mais elle pensait que c’était sa faute.
« S’il te bat, c’est qu’il t’aime » , dit un proverbe russe.
> Spécificités < - Editions originales : Editions de L'Iconoclaste - Date de parution : 18/08/2022 - Nombre de pages : 247
Ce roman est celui de toute l’horreur des lois russes en matière de violences conjugales. En effet, durant les années 2000, le système législatif russe a grandement facilité la perpétration de violences à l’égard des femmes en rendant en quelque sorte « légal » le fait de lever la main sur sa compagne, de la battre, voire même de la tuer.
Avec un compte à rebours de 11 ans, c’est une véritable plongée dans la société russe que nous emmène faire l’autrice, Laura Poggioli, ayant elle-même habité ce pays, qui occupe encore plus une place prépondérante sur le devant de la scène internationale depuis février 2022.
Dans un pays où l’un des dictons dit « s’il te bat, c’est qu’il t’aime », l’homme occupe une place centrale dans le couple, dans la famille, dans la société. Les femmes ne sont guère que des êtres inférieurs où leur parole n’est que peu entendue. Alors qu’en Europe, nous entendons déjà quotidiennement que trop de féminicides ou de cas de violences domestiques, pas un jour ne passe en Russie où des femmes en sont encore plus sujettes.
Associant son vécu personnel d’un pays qu’elle connait bien (mais surtout victime d’un compagnon violent) à celui des sœurs Khatchatourian, l’autrice nous conte ce soir du 27 juillet 2018, où les 3 sœurs n’ont eu d’autre choix que de tuer leur père après avoir été victimes de violences physiques, sexuelles et psychologiques durant de très longues années.
Ce terrible fait divers a ouvert les yeux et conscientiser de nombreux russes. Il a, par ailleurs, provoqué un soulèvement de la société contre un système légal bien trop laxiste. Abordé comme une enquête journalistique, ce thème central est finement travaillé et bien documenté.
J’ai beaucoup apprécié ce livre malgré la dureté de ce qui est rapporté. Pour ma part, il s’agit d’un livre déjà très réussi pour un premier roman. A aucun moment, je n’ai trouvé certaines petites anicroches qu’il aurait été en quelque sorte normal d’y constater au fil des pages. Il est à la fois porté par une plume déjà bien aboutie ainsi que par une force incroyable du fait de la touche intimiste issue de l’histoire personnelle de l’autrice. J’espère très fort que le talent de Laura Poggioli pourra se confirmer aux travers d’autres écrits.
Je vous le conseille vivement et il est certain qu’il est un des livres marquants de 2022.
Je remercie l’Agence Levens et les Editions de l’Iconoclaste pour leur confiance.