La date du mercredi 18 août est une date importante pour des nombreuses maisons d’édition car elle lance officiellement la rentrée littéraire pour celles-ci. Vu la pléthore de livres qui paraissent que ce jour-là, j’ai décidé d’en consacrer un article à part entière.
Voici donc les livres qui ont attiré mon attention pour cette date et attention, ils sont nombreux 😉
- « La carte postale » d’Anne Berest aux Editions Grasset, 512 pages.
C’était en janvier 2003. Dans notre boîte aux lettres, au milieu des traditionnelles cartes de vœux, se trouvait une carte postale étrange. Elle n’était pas signée, l’auteur avait voulu rester anonyme.
L’Opéra Garnier d’un côté, et de l’autre, les prénoms des grands-parents de ma mère, de sa tante et son oncle, morts à Auschwitz en 1942.
Vingt ans plus tard, j’ai décidé de savoir qui nous avait envoyé cette carte postale. J’ai mené l’enquête, avec l’aide de ma mère. En explorant toutes les hypothèses qui s’ouvraient à moi. Avec l’aide d’un détective privé, d’un criminologue, j’ai interrogé les habitants du village où ma famille a été arrêtée, j’ai remué ciel et terre. Et j’y suis arrivée.
- « Au-delà de la mer » de Paul Lynch aux Editions Albin Michel, collection : Terres d’Amérique, traduction de Marina Boraso, 240 pages.
Malgré l’annonce d’une tempête, Bolivar, un pêcheur sud-américain, convainc le jeune Hector de prendre la mer avec lui. Tous deux se retrouvent vite à la merci des éléments, prisonniers de l’immensité de l’océan Pacifique. Unis par cette terrifiante intimité forcée et sans issue, ils se heurtent aux limites de la foi et de l’espoir, à l’essence de la vie et de la mort, à leur propre conscience. Dans ce face-à-face d’une intensité spectaculaire, Paul Lynch explore la condition humaine avec une force digne d’Hemingway ou de Camus, et s’impose définitivement comme un virtuose des lettres irlandaises.
Un roman sublime – voici ma chronique : https://musemaniasbooks.be/2021/08/18/chronique-au-dela-de-la-mer-de-paul-lynch-roman/
- « La danse de l’eau » de Ta-Nehisi Coates aux Editions Fayard, traduction de Pierre Demarty, 480 pages.
Le jeune Hiram Walker est né dans les fers. Le jour où sa mère a été vendue, Hiram s’est vu voler les souvenirs qu’il avait d’elle. Tout ce qui lui est resté, c’est un pouvoir mystérieux que sa mère lui a laissé en héritage.
Des années plus tard, quand Hiram manque se noyer dans une rivière, c’est ce même pouvoir qui lui sauve la vie. Après avoir frôlé la mort, il décide de s’enfuir de chez lui, loin du seul monde qu’il ait jamais connu.
Ainsi débute un périple plein de surprises, qui va entraîner Hiram depuis la splendeur décadente des fières plantations de Virginie jusqu’aux bastions d’une guérilla acharnée au cœur des grands espaces américains, du cercueil esclavagiste du Sud profond aux mouvements dangereusement idéalistes du Nord. Alors même qu’il s’enrôle dans la guerre clandestine qui oppose les maîtres aux esclaves, Hiram demeure plus que jamais déterminé à sauver la famille qu’il a laissée derrière lui.
- « Les djihadistes aussi ont des peines de coeur » de Morgan Sportès aux Editions Fayard, 416 pages.
Septembre 2012, six mois après les attentats de Mohamed Mehra : une grenade jetée dans une épicerie casher de la banlieue parisienne fait un blessé léger. Apprenti terroriste, le coupable a laissé ses traces ADN sur la goupille du projectile. On l’identifie. Mais la police le laisse courir – pendant deux semaines – entre ses diverses résidences de Paris, Nice, Nancy, afin de repérer ses complices. Lesquels envisagent de nouvelles agressions, cette fois contre des militaires français, dans le sud du pays. Une vingtaine de ces « djihadistes » amateurs (post-ados black-blanc-beur) sont alors capturés lors d’un vaste coup de filet. L’un d’entre eux est abattu. D’autres s’enfuient en Syrie pour un « djihad » différent : se battre aux côtés d’Al Nosra contre le « dictateur hérétique » Bachar el-Assad.
- « Dernière oasis » de Charif Majdalani aux Editions Actes Sud, 272 pages.
Un spécialiste libanais de l’archéologie orientale est invité dans le nord de l’Irak par un certain général Ghadban à expertiser diverses pièces antiques. Il est reçu au milieu de plantations qui sont comme une oasis dans le désert, un îlot hors du temps, où il attend son mystérieux hôte en méditant sur la splendeur des paysages et sur l’origine des pièces qu’il soupçonne d’être liées à un important trafic d’art. Mais en ce début d’été 2014, à la veille du déferlement de violence en Irak, ce lieu d’apparence si paisible, occupé par l’atypique brigade du général Ghadban, entouré d’un côté par les forces kurdes et de l’autre par les djihadistes de Daech, se retrouve aux avant-postes de grands bouleversements – autant dire que sa sereine beauté est digne du calme qui précède la tempête.
- « Femmes du ciel et des tempêtes » de Wilfried N’Sondé aux Editions Actes Sud, 272 pages.
Un chaman de Sibérie trouve sous le permafrost la sépulture d’une reine datant de plus de dix mille ans. Stupéfaction : le corps momifié par les glaces a la peau noire. Décidé à utiliser sa découverte pour protéger un territoire menacé par l’exploitation gazière, le chaman contacte un ami scientifique français dans l’espoir qu’il mobilisera les écologistes du monde entier. Celui-ci monte une discrète expédition avec une docteure germano-japonaise et un ethnologue congolais. Deux mafieux qui tiennent à leurs projets industriels les attendent de pied ferme…
On retrouve l’enthousiasme de Wilfried N’Sondé dans un roman d’aventures haletant qui parle d’écologie, d’harmonie avec le vivant, de partage entre les peuples et de communication entre mondes visible et invisible.
- « La femme et l’oiseau » d’Isabelle Sorente aux Editions JC Lattès, 370 pages.
Lorsque sa fille, Vina, est exclue du lycée pour avoir menacé un camarade, Elizabeth décide de se réfugier avec elle en Alsace chez son grand-oncle Thomas.
Dans cette maison en lisière de forêt, tous trois s’observent et s’apprivoisent. Malgré-nous, pris au piège de combats qu’ils n’ont pas choisis, ils le sont tous les trois : Thomas précipité dans le chaos du front de l’Est; Elizabeth qui ne vit que pour sa fille et son travail; Vina, l’adolescente emportée par une violence qui la dépasse. Bientôt la jeune fille est fascinée par ce grand-oncle qui communique avec les oiseaux et semble lire les pensées.
Ces dons, Thomas les a acquis pendant la guerre. Quand il lui a fallu survivre dans les rangs de l’armée allemande, puis emprisonné au camp de Tambov. Quand il a rencontré le faucon pour la première fois.
- « Feu » de Marie Pourchet aux Editions Fayard, 250 pages.
Laure, prof d’Université, est mariée et mère de deux filles. De Véra, l’aînée, qui organise des mouvements d’insurrection au lycée, Laure envie l’incandescence et la rage. Elle qui, à 40 ans, regrette parfois d’être la somme de la patience et des compromis.
Clément, célibataire, 50 ans, court le matin et parle à son chien le soir. Entre les deux il s’ennuie dans la finance, au sommet d’une tour vitrée, lassé de la vue qu’elle offre presque autant que de YouPorn.
Laure monte sans passion des colloques en Histoire contemporaine. Clément anticipe les mouvements des marchés, déplorant que les crises n’arrivent jamais vraiment, que le pire ne soit qu’une promesse perpétuellement reconduite.
De la vie, l’une attend la surprise. L’autre, toute capacité d’illusion anéantie, attend qu’elle finisse, fatigué d’être un homme dans un monde où seules les tours de la Défense sont légitimement phalliques. Bref, il serait bon que leur arrive quelque chose. Ils vont être l’un pour l’autre un choc nécessaire.
- « Les contreforts » de Guillaume Sire aux Editions Calmann-Lévy, 336 pages.
Au seuil des Corbières, les Testasecca habitent un château-fort fabuleux, fait d’une multitude anarchique de tourelles, de coursives, de chemins de ronde et de passages dérobés.
Clémence, dix-sept ans, bricoleuse de génie, rafistole le domaine au volant de son fidèle tracteur ; Pierre, quinze ans, hypersensible que sa sœur protège d’un amour rugueux, braconne dans les hauts plateaux ; Léon, le père, vigneron lyrique et bagarreur, voit ses pouvoirs décroître à mesure que la vieillesse le prend ; Diane, la mère, essaie tant bien que mal de gérer la propriété.
Ils sont ruinés. Dans l’incapacité d’assumer les coûts nécessaires à la préservation du domaine, ils sont menacés d’expulsion. Et la nature autour devient folle : des hordes de chevreuils désorientés ravagent les cultures.
Frondeurs et orgueilleux, les Testasecca décident de prendre les armes pour défendre le château, son histoire et finalement ce qu’ils sont.
- « On ne parle plus d’amour » de Stéphane Hoffmann aux Editions Albin Michel, 256 pages.
Louise et Guillaume ne parlent plus d’amour, ils le font.
Pourtant, Louise doit épouser dans quelques mois un homme riche qu’elle méprise, quand Guillaume tente de se relever d’un chagrin où il a cru mourir.
Leur passion bouleverse tout dans cette petite villégiature de Bretagne où s’agite une société qui ne croit qu’au champagne, aux régates, aux jardins, aux bains de mer et autres plaisirs de l’été.
Dans On ne parle plus d’amour, il n’est question que d’amour. Il blesse, distrait, porte, détruit, réconforte et s’impose à la dizaine de personnages qu’il mène dans ce roman vibrant et léger comme une flèche, et qui frappe en plein cœur.
- « La fabrique des souvenirs » de Clélia Renucci aux Editions Albin Michel, 320 pages.
Dans un monde où les souvenirs se vendent et s’échangent grâce à une application révolutionnaire, Gabriel, amateur de théâtre, revit à plus d’un demi-siècle de distance la première de Phèdre en 1942 à la Comédie Française. Dans la salle, il remarque une spectatrice dont la nuque l’envoûte aussitôt, et se lance dans une quête éperdue pour découvrir l’identité de l’inconnue. Oriane Devancière, violoncelliste de renom, va le mener aux sources d’un amour authentique.
- « Elle n’est pas des nôtres » de Sandie Jones aux Editions Hauteville, traduction de Florence Moreau, 448 pages.
Depuis la mort de son mari, Rose tente de préserver l’unité de la famille en réunissant ses filles autour d’un repas dominical. Mais la relation entre les deux soeurs est tendue ; Kate essaie désespérément de tomber enceinte tandis que Lauren, mère de trois enfants, semble avoir tout ce que désire sa soeur : une vie familiale épanouie. Pourtant, les apparences sont trompeuses, et personne n’a idée du calvaire que lui fait vivre son mari.
Leur fragile équilibre vole en éclats le jour où Jess, 21 ans, vient frapper à leur porte, test ADN en main. Elle affirme être leur demi-soeur. Leur père aurait-il eu une double vie ? Dans cette famille où chacun cache bien son jeu, qui est prêt à prendre le risque de briser le mythe familial pour faire éclater la vérité ?
- « Pleine terre » de Corinne Royer aux Editions Actes Sud, 336 pages.
Ce matin-là, Jacques Bonhomme n’est pas dans sa cuisine, pas sur son tracteur, pas auprès de ses vaches. Depuis la veille, le jeune homme est en cavale : il a quitté sa ferme et s’est enfui, pourchassé par les gendarmes comme un criminel. Que s’est-il passé ?
D’autres voix que la sienne – la mère d’un ami, un vieux voisin, une sœur, un fonctionnaire – racontent les épisodes qui ont conduit à sa rébellion. Intelligent, travailleur, engagé pour une approche saine de la terre et des bêtes, l’éleveur a subi l’acharnement d’une administration qui pousse les paysans à la production de masse, à la déshumanisation de leurs pratiques et à la négation de leurs savoir-faire ancestraux. Désormais dépouillé de ses rêves et de sa dignité, Jacques oscille entre le désespoir et la révolte, entre le renoncement et la paradoxale euphorie de la cavale vécue comme une possible liberté, une autre réalité.
- « Il était une fois à Hollywood » de Quentin Tarantino aux Editions Fayard, traduction de Nicolas Richard, 400 pages.
Hollywood 1969… comme si vous y étiez !
Rick Dalton – Il fut un temps, Rick avait son propre feuilleton télé. Aujourd’hui, c’est un acteur rincé, condamné à jouer les crapules à la petite semaine, qui noie son chagrin dans les whisky sour. Un coup de fil de Rome : sauvera-t-il son destin ou le scellera-t-il ?
Cliff Booth – Doublure cascade de Rick, il est l’homme à la réputation la plus sulfureuse de tous les plateaux de tournage – car il est le seul à avoir (peut-être) commis un meurtre et à s’en être tiré.
Sharon Tate – Elle a quitté son Texas natal en rêvant de devenir star de cinéma. Et ce rêve, elle l’a réalisé. Sharon passe désormais ses jeunes années dans sa villa de Cielo Drive, là-haut, dans les collines de Hollywood.
Charles Manson – L’ancien taulard a convaincu une bande de hippies azimutés qu’il était leur leader spirituel. Mais il changerait bien de casquette pour devenir une star du rock’n’roll.
- « Implosions » d’Hyam Yared Shoucair aux Editions des Equateurs, 268 pages.
Le 4 août 2020 à 18 heures et 7 minutes, la narratrice se voit propulsée sous le bureau de sa thérapeute. Elle est à quatre pattes, entre son mari et leur psy. Une bombe vient de ravager Beyrouth. Une apocalypse. Et le scénario en train de se produire dans ce cabinet : celui d’un couple en déliquescence. La narratrice est une affranchie. Elle veut vivre tout de suite et tout à la fois. Être mère, épouse et écrivaine, « beauvoirienne » et pondeuse multi―récidiviste. Plutôt que de choisir, elle a embrassé la multitude : femme remariée, mère de cinq filles, auteure de nombreux livres, écartelée entre Beyrouth et Paris, entre sa soif d’écriture et ses maternités, entre la joie de l’enfantement et l’instinct de fuite. Son énergie vitale est ce prix, c’est une bombe à retardement. Comme son couple, tiraillé entre un homme analyste et une femme guidée par les méandres de l’écriture. En bref, « la rencontre d’une centrale nucléaire avec une éolienne ». Comme cette ville qu’est Beyrouth, fendue, divisée, sectionnée de toutes parts, par les guerres, les rancoeurs entretenues, jusqu’à cette ultime désintégration.
- « Premier sang » d’Amélie Nothomb chez Albin Michel, 180 pages.
Sous la forme d’un conte, Amélie Nothomb raconte la vie de Patrick, son père, doux enfant angélique qui, jeune adulte, devra se confronter à la mort.
Un magnifique hommage à la figure paternelle mais aussi à un héros de l’ombre, diplomate à la carrière hors norme.
- « Enfant de salaud » de Sorj Chalandon aux Editions Grasset, 336 pages.
Depuis l’enfance, une question torture le narrateur :
– Qu’as-tu fait sous l’occupation ?
Mais il n’a jamais osé la poser à son père.
Parce qu’il est imprévisible, ce père. Violent, fantasque. Certains même, le disent fou. Longtemps, il a bercé son fils de ses exploits de Résistant, jusqu’au jour où le grand-père de l’enfant s’est emporté : «Ton père portait l’uniforme allemand. Tu es un enfant de salaud ! »
En mai 1987, alors que s’ouvre à Lyon le procès du criminel nazi Klaus Barbie, le fils apprend que le dossier judiciaire de son père sommeille aux archives départementales du Nord. Trois ans de la vie d’un « collabo », racontée par les procès-verbaux de police, les interrogatoires de justice, son procès et sa condamnation.
Le narrateur croyait tomber sur la piteuse histoire d’un « Lacombe Lucien » mais il se retrouve face à l’épopée d’un Zelig. L’aventure rocambolesque d’un gamin de 18 ans, sans instruction ni conviction, menteur, faussaire et manipulateur, qui a traversé la guerre comme on joue au petit soldat. Un sale gosse, inconscient du danger, qui a porté cinq uniformes en quatre ans. Quatre fois déserteur de quatre armées différentes. Traître un jour, portant le brassard à croix gammée, puis patriote le lendemain, arborant fièrement la croix de Lorraine.
- « Un tesson d’éternité » de Valérie Tong Cuong aux Editions JC Lattès, 300 pages.
Anna Gauthier mène une existence à l’abri des tourments entre sa pharmacie, sa villa surplombant la mer et sa famille soudée.
Dans un climat social inflammable, un incident survient et son fils Léo, lycéen sans histoire, se retrouve aux prises avec la justice. Anna assiste impuissante à l’écroulement de son monde, bâti brique après brique, après avoir mesuré chacun de ses actes pour en garder le contrôle.
Qu’advient-il lorsqu’un grain de sable vient enrayer la machine et fait voler en éclats les apparences le temps d’un été ?
- « Revenir à toi » de Leonor de Recondo aux Editions Grasset, 180 pages.
Lorsqu’elle reçoit un message lui annonçant qu’on a retrouvé sa mère, disparue trente ans plus tôt, Magdalena n’hésite pas. Elle prend la route pour le Sud-Ouest, vers la maison éclusière dont on lui a donné l’adresse, en bordure de canal.
Comédienne réputée, elle a vécu toutes ces années sans rien savoir d’Apollonia. Magdalena a incarné des personnages afin de ne pas sombrer, de survivre à l’absence. Dès lors que les retrouvailles avec sa mère approchent, elle est à nu, dépouillée, ouverte à tous les possibles.
Revenir à toi, c’est son voyage vers Apollonia. Un voyage intérieur aussi, vers son enfance, son père, ses grands-parents, ses amours. Un voyage charnel, parenthèse furtive et tendre avec un jeune homme de la région. Lentement se dévoile un secret ancien et douloureux, une omission tacitement transmise.
Revenir à toi, c’est aussi un hommage à Antigone et aux grands mythes littéraires qui nous façonnent. Magdalena a donné vie à des personnages, elle est devenue leur porte-voix. Devant Apollonia, si lointaine et si fragile, sa voix intérieure se fait enfin entendre, inquiète mais déterminée à percer l’énigme de son existence.
En l’espace de quelques jours, dans cette maison délaissée, Magdalena suit un magnifique chemin de réconciliation avec l’autre et avec elle-même. Vie rêvée et vie vécue ne font désormais qu’une.
- « Au printemps des monstres » de Philippe Jaenada aux Editions Mialet Barrault, 752 pages.
Ce n’est pas de la tarte à résumer, cette histoire. Il faut procéder calmement. C’est une histoire vraie, comme on dit. Un garçon de onze ans est enlevé à Paris un soir du printemps 1964. Luc Taron. (Si vous préférez la découvrir dans le livre, l’histoire, ne lisez pas la suite : stop !) On retrouve son corps le lendemain dans une forêt de banlieue. Il a été assassiné sans raison apparente. Pendant plus d’un mois, un enragé inonde les médias et la police de lettres de revendication démentes, signées « L’Étrangleur » ; il adresse même aux parents de l’enfant, horrifiés, des mots ignobles, diaboliques, cruels. Il est enfin arrêté. C’est un jeune homme banal, un infirmier. Il avoue le meurtre, il est incarcéré et mis à l’écart de la société pour le reste de sa vie. Fin de l’histoire. Mais bien sûr, si c’était aussi simple, je n’aurais pas passé quatre ans à écrire ce gros machin (je ne suis pas fou). Dans cette société naissante qui deviendra la nôtre, tout est trouble, tout est factice. Tout le monde truque, ment, triche. Sauf une femme, un point de lumière. Et ce qu’on savait se confirme : les pervers, les fous, les odieux, les monstres ne sont pas souvent ceux qu’on désigne.
- « Le voyage dans l’Est » de Christine Angot aux Editions Flammarion, 252 pages.
« J’ai fait comme s’il ne se passait rien. Je regardais le paysage devant moi. Les essuie-glaces couchés au bas de la vitre. La main allait et venait sur ma cuisse. Elle s’est déplacée vers le haut. J’ai été consciente de sa position à tout moment. Mon attitude était celle de quelqu’un qui n’a rien de particulier à dire. Mon état intérieur, à l’opposé. Il aurait mérité d’être exprimé si je m’en étais sentie capable. Je dissimulais mon incapacité par un comportement sans histoire. Sachant que je ne saurais pas quoi dire si la limite était dépassée. Mon esprit était occupé à raisonner. Il n’était pas vide. Je surveillais. C’était une surveillance de tous les instants. Proche. Serrée sur le mouvement. Même d’un doigt sur le tissu de mon pantalon. Je surveillais, je surveillais, je surveillais. Ça risquait d’être inutile. Je le savais. Si la limite, que je pouvais faire semblant de supporter, était dépassée, j’avais conscience que j’aurais peut-être à en supporter plus. Mon raisonnement se bloquait avant. Je n’allais pas jusque-là. Je continuais d’interpréter les passages de main comme anodins, et de m’accrocher à leur innocence. »
- « Satisfaction » de Nina Bouraoui aux Editions JC Lattès, 250 pages.
« Je pense souvent à ce qu’il restera, à ce qu’Erwan gardera de moi, de son enfance, j’aimerais saisir, révéler ses sensations sur la pellicule photographique, graver nos instants, craignant que l’amour ne disparaisse avec les souvenirs, graver l’odeur du jasmin quand nous nous approchons de notre maison, odeur de la stabilité du lieu intérieur malgré les désordres de mon cœur, contre la violence extérieure, réelle ou imaginaire, de la mer, des hommes. »
- « Plasmas » de Céline Minard aux Editions Payot & Rivages, 160 pages.
Céline Minard nous plonge dans un univers renversant, où les espèces et les genres s’enchevêtrent, le réel et le virtuel communiquent par des fils ténus et invisibles. Qu’elle décrive les mesures sensorielles effectuées sur des acrobates dans un monde post-humain, la conservation de la mémoire de la Terre après son extinction, la chute d’un parallélépipède d’aluminium tombé des étoiles et du futur à travers un couloir du temps, ou bien encore la création accidentelle d’un monstre génétique dans une écurie de chevaux sibérienne, l’auteure dessine le tableau d’une fascinante cosmo-vision, dont les recombinaisons infinies forment un jeu permanent de métamorphoses. Fidèle à sa poétique des frontières, elle invente, ce faisant, un genre littéraire, forme éclatée et renouvelée du livre-monde.
- « Climax » de Thomas B. Reverdy aux Editions Flammarion, 336 pages.
Ce n’est pas vraiment une ville, plutôt une sorte de village de pêcheurs aux maisons d’un étage, niché au creux d’un bras de mer qui s’enfonce comme une langue, à l’extrême nord de la Norvège. C’est là que tout commence, ou plutôt que tout semble finir. Ça a débuté avec l’accident sur la plateforme pétrolière, de l’autre côté du chenal. Ça a continué avec cette fissure qui menace dangereusement le glacier, ces poissons qu’on a retrouvés morts. Et si c’était lié ? C’est en tant qu’ingénieur géologue que Noah, enfant du pays, va revenir et retrouver Anå, son amour de jeunesse, ainsi que les anciens amis qu’il avait initiés aux jeux de rôles. Il était alors Sigurd, du nom justement de cette maudite plateforme.
- « Les rêveurs définitifs » de Camille de Peretti aux Editions Calmann-Lévy, 342 pages.
Emma est traductrice et habite un petit appartement parisien avec Quentin, son fils de quatorze ans.
Lasse de traduire des bluettes sans intérêt, elle rêve d’écrire un grand roman. Au lieu de quoi, rattrapée par des problèmes d’argent, elle est contrainte d’accepter une mission de conseil chez Kiwi, un géant du web qui veut développer un logiciel de traduction infaillible. Mais participer à cette entreprise, n’est-ce pas contribuer à rendre son métier inutile ? Tandis qu’Emma se débat dans ses contradictions, Quentin, lui, vit des aventures extraordinaires dans les jeux vidéo, et s’imagine en gameur de génie. Jusqu’au jour où il est contacté par une mystérieuse organisation qui veut s’attaquer à Kiwi.
- « Ce que l’on sait de Max Toppard » de Nicolas d’Estiennes d’Orves aux Editions Albin Michel, 512 pages.
Dans « la Rose pourpre du Caire », le film de Woody Allen,une jeune femme prénommée Cécilia, s’évade de son existence morne et tourmentée dans les salles de cinéma, jusqu’au jour où le héros d’un mélo jaillit de l’écran et l’enlève. Dans « Ce que l’on sait de Max Toppard », Caroline part à la recherche d’un cinéaste inconnu et comprend à mesure qu’avance l’histoire que la vraie vie c’est le cinéma, et que l’existence qui est la sienne n’est sans doute qu’une illusion.
- « L’île du docteur Faust » de Stéphanie Janicot aux Editions Albin Michel, 304 pages.
Tandis que la nuit tombe, neuf femmes attendent l’arrivée d’un passeur qui doit les mener sur une île au large de la Bretagne. Toutes ont payé le prix pour suivre un programme leur promettant de retrouver leurs vingt ans. Seule l’une d’entre elles, invitée, s’est juré de résister à la tentation. Mais le séjour et le mystère grandissant qui l’entoure, tout autant que le trouble suscité par le docteur Faust, vont lui révéler la difficulté de refuser ce pacte diabolique.
Comment maîtriser le temps ? Accomplir nos rêves les plus sacrés, l’amour, la création ? Comme elle s’est plu à se jouer des mythes et des légendes dans ses précédents livres, Stéphanie Janicot interroge dans ce roman envoûtant le fantasme de la jeunesse éternelle et de la toute-puissance, l’illusion, la féminité et la force du désir.
- « Le voyant d’Etampes » d’Abel Quentin aux Editions L’Observatoire, nombre de pages non communiqués.
« J’allais conjurer le sort, le mauvais oeil qui me collait le train depuis près de trente ans. Le Voyant d’Étampes serait ma renaissance et le premier jour de ma nouvelle vie. J’allais recaver une dernière fois, me refaire sur un registre plus confidentiel, mais moins dangereux. » Universitaire alcoolique et fraîchement retraité, Jean Roscoff se lance dans l’écriture d’un livre pour se remettre en selle : Le voyant d’Étampes, essai sur un poète américain méconnu qui se tua au volant dans l’Essonne, au début des années 60. A priori, pas de quoi déchaîner la critique. Mais si son sujet était piégé ? Abel Quentin raconte la chute d’un anti-héros romantique et cynique, à l’ère des réseaux sociaux et des dérives identitaires. Et dresse, avec un humour délicieusement acide, le portrait d’une génération. Je vous en parle bientôt.
- « Pour te ressembler » de Christine Détrez aux Editions Denoël, 224 pages.
Christine Détrez a perdu sa mère à deux ans et demi et n’entendra plus jamais parler d’elle. Elle sera élevée par une autre femme, que de tout son cœur elle appellera maman. Devenue sociologue, épouse, mère à son tour, Christine Détrez s’autorise enfin le droit de savoir. Débarrassée de la peur et de la culpabilité, elle remonte avec ferveur le fil d’une vie, cherche, interroge, invente. À partir du souvenir d’un geste, celui d’une démarche, l’intonation d’un mot, mais aussi des comédies musicales qui ont bercé son enfance, elle érige le portrait d’une femme libre et passionnée, faisant ainsi de sa mère une véritable héroïne romanesque.
Entre enquête de terrain et coïncidences magiques, un récit littéraire fascinant qui pose la question de l’identité face aux silences et aux secrets de famille.
- « G.A.V. » de Marin Fouqué aux Editions Actes Sud, 448 pages.
Deux coups de feu ont retenti dans le quartier et les policiers rêvent de mettre la main sur le fauteur de troubles. En attendant, ils ont embarqué Angel, qui n’en est pas à sa première garde à vue. Mais Angel connaît la musique, il ne balancera personne.
Une nuit dans un commissariat, à chaque cellule sa voix : Angel à l’étrange sourire ; une jeune femme soumise au harcèlement quotidien d’un entrepôt ; des émeutiers ramassés à la fin d’une marche pour le climat ; un vieux manifestant brutalisé ; un cadre en dégrisement ; un flic exténué ; un adolescent souffre-douleur… Parias d’une nuit ou d’une vie, ils n’ont rien à déclarer, mais un destin à endosser, des circonstances à ressasser, une colère à exprimer, des espoirs à ranimer.
- « Le grand saut » de Renaud Dély aux Editions JC Lattès, 220 pages.
Jeux olympiques de Los Angeles, 8 août 1984. Un jeune homme aux boucles brunes court à petites foulées, sa perche à la main.
À des milliers de kilomètres, en pleine nuit, un enfant est planté devant son poste de télévision. Il regarde Pierre Quinon qui s’envole, décroche la médaille d’or du saut à la perche. La prouesse lui fait oublier, un instant, le souffle court de sa mère dans la chambre à côté.
Pourtant…
Malgré une jeunesse assombrie, l’enfant construira sa vie. En dépit d’une jeunesse lumineuse, Pierre Quinon écourtera la sienne. Il se défenestre le 17 août 2011, miroir inversé du saut qui l’a sacré dieu de l’Olympe.
Deux trajectoires, deux existences, racontées par la mémoire du cœur.
- « L’agneau des neiges » Dmitri Bortnikov aux Editions Payot & Rivages, traduction non communiquée, 288 pages.
Au nord de la Russie, au bord de la mer Blanche, Maria, une jeune infirme, née au lendemain de la Révolution, apprend à survivre. Au fil des années, ballotée de région en région, elle s’illustre par son courage. Après la perte de ses êtres chers, elle se retrouve à Léningrad dont elle affronte le blocus par les forces nazies avec abnégation. En charge de douze orphelins, elle mettra tout en œuvre pour les protéger jusqu’à se sacrifier pour les sauver de la famine et de la mort.
- « Revenir fils » de Christophe Perruchas aux Editions du Rouergue, 288 pages.
Depuis la mort de son père, le narrateur, un collégien de quatorze ans, vit seul avec sa mère, qui montre les signes grandissants d’un syndrome de Diogène : elle accumule les objets qui envahissent peu à peu la maison. Tandis que le fils adolescent continue de grandir et d’explorer, la mère se replie jour après jour dans un monde où un premier enfant, Jean, touché par la mort subite du nourrisson, reprend vie.
Dans deux séquences séparées par une vingtaine d’années, Christophe Perruchas fait entendre les deux voix de la mère et de son fils : le récit d’une folie qui se referme sur une maison-paysage, monstrueuse matrice ; le portrait d’un fils qui bute sur l’impossible. D’abord adolescent puis jeune père lui-même, on le voit se confronter à cette mère inaccessible, qui l’a « orpheliné de son vivant ».
- « Et pourtant ils existent » de Thierry Froger aux Editions Actes Sud, 336 pages.
D’abord il y a la nuit, la lune, la mer, une exécution sur une plage d’Ibiza. Un homme tombe sur le sable, et le roman s’enclenche. Au café du Croissant à Paris, Jean Jaurès ne finit pas sa tarte aux fraises, interrompu par deux balles tirées à bout portant. Un matin, la petite Rose est réveillée par sa mère qui vient lui annoncer la mort de son arrière-grand-père, ce héros de la guerre d’Espagne. Le seul ?
- « Lorsque le dernier arbre » de Michael Christie aux Editions Albin, traduction de Sarah Gurcel, 608 pages.
D’un futur proche aux années 1930, Michael Christie bâtit, à la manière d’un architecte, la généalogie d’une famille au destin assombri par les secrets et intimement lié à celui des forêts.
20382038. Les vagues épidémiques du Grand Dépérissement ont décimé tous les arbres et transformé la planète en désert de poussière. L’un des derniers refuges est une île boisée au large de la Colombie-Britannique, qui accueille des touristes fortunés venus admirer l’ultime forêt primaire. Jacinda y travaille comme de guide, sans véritable espoir d’un avenir meilleur. Jusqu’au jour où un ami lui apprend qu’elle serait la descendante de Harris Greenwood, un magnat du bois à la réputation sulfureuse. Commence alors un récit foisonnant et protéiforme dont les ramifications insoupçonnées font écho aux événements, aux drames et aux bouleversements qui ont façonné notre monde. Que nous restera-t-il lorsque le dernier arbre aura été abattu ?
Fresque familiale, roman social et écologique, ce livre aussi impressionnant qu’original fait de son auteur l’un des écrivains canadiens les plus talentueux de sa génération. Je vous en parle bientôt.
- « La mélancolie des baleines » de Philippe Gerin aux Editions Gaïa, 288 pages.
Pour honorer la promesse faite à leur fils Eldfell de l’emmener voir les baleines en Islande, Ayden et Sasha sont de retour là où tout a commencé pour eux. Mais neuf ans après, l’île a bien changé et la vulnérabilité nouvelle de leur enfant teinte d’inquiétude l’euphorie du voyage tant attendu.
Chauffeur de bus, Guðmundur arpente inlassablement chaque jour la route circulaire. À la nuit tombée, il se rêve écrivain et couche sur le papier des bribes de romans. Abandonné par ses parents, l’homme aux yeux vairons cherche à savoir qui il est vraiment. La tache de naissance à la forme énigmatique, sur son cou, pourra-t-elle l’aider à percer le mystère de ses origines ?
Après une vie passée à prendre soin des autres, Arna est retournée habiter la maison bleue de son enfance. Dans les confins de ce territoire sauvage, la disparition inexpliquée de son compagnon vingt-cinq ans plus tôt continue de la hanter. Quand d’étranges phénomènes se produisent autour de sa propriété, elle se prend à imaginer l’impossible.
Un soir de tempête, Ayden, Sasha, Eldfell et Guðmundur finiront par s’échouer dans la maison d’Arna, en surplomb de la plage de sable noir où viennent se laisser mourir des cétacés. Au matin, tout aura changé pour eux.
- « L’amour par temps de crise » de Daniela Krien aux Editions Albin Michel, traduction de Dominique Autrand, 336 pages.
Elles s’appellent Paula, Judith, Brida, Malika et Jorinde. Elles veulent tout, ont obtenu beaucoup, mais continuent de s’interroger sur des questions cruciales. Les rapports de force entre les sexes, la place de l’enfant et du travail, l’héritage familial, la fragilité de l’amour. La liberté qu’elles assument et revendiquent cache une autre forme de contrainte : elle oblige à choisir.
D’une écriture élégante et précise, Daniela Krien explore les sentiments, les contradictions, les désirs de cinq femmes dont les parcours se croisent subtilement. Une justesse de ton, un regard aigu et une impressionnante finesse d’analyse font de ce roman, véritable phénomène en Allemagne, une radiographie captivante de la femme moderne dans une société en plein bouleversement.
- « Zone blanche » de Jocelyn Bonnerave au Editions du Rouergues, 224 pages.
Maxime est un musicien célèbre. Depuis longtemps il a rompu les ponts avec sa famille et n’a plus que des contacts épisodiques avec son frère cadet, Christophe. Mais lorsque celui-ci disparaît sur une ZAD, lors d’une opération des gendarmes mobiles, il répond à l’appel de sa compagne et se joint aux recherches. Ce qui n’est, croit-il, qu’une parenthèse dans une vie réglée par l’ambition et la discipline va pourtant se prolonger.
Sur la ZAD où luttent ensemble militants anti-nucléaires, paysans, utopistes mutants et marginaux cabossés par l’existence, Maxime fait en effet la connaissance d’Emeline, la compagne de Christophe, et surtout de Lilia, leur petite fille de quatre ans. Quel était le sens de la vie de Christophe en ces lieux, telle est désormais pour lui la question.
- « Campagne » de Matthieu Falcone aux Editions Albin Michel, 304 pages.
« Quoi que l’on fasse, de quelque partie que l’on vienne, le village se cache, ne se montre pas de loin. C’est un village tout plié sur lui-même, en boule la tête dans le cul, comme un chat endormi. Au milieu coule une rivière. C’est-à-dire qu’elle était au milieu, avant qu’il soit désaxé, le village, étendu vers le sud pour les nouvelles constructions. Ici, au village, on en trouve comme cela, qui disent à présent qu’il faut sauver la Terre. Sauver la Terre, je veux bien moi, mais qui nous sauvera, nous ? »
De jeunes citadins, pétris de certitudes, se sont installés dans un village de la France profonde afin d’y organiser une « grande fête participative ». Entre eux et les paysans, le choc est inévitable, le drame annoncé.
Roman féroce et plein d’humanité sur le nouveau monde rural que s’approprient les urbains, modifiant ses règles et bouleversant ses coutumes ancestrales, Campagne est une réflexion profonde sur le désarroi des hommes et la puissance de la nature. On retrouve le style grinçant et la langue de Matthieu Falcone, l’auteur d’Un bon Samaritain.
- « Les garçons de la cité-jardin » de Dan Nisand aux Editions Les avrils, 384 pages.
Melvil a grandi dans l’un des 138 pavillons de la cité-jardin Hildenbrandt, en Alsace. A vingt-cinq ans, sa vie se résume à un modeste emploi en mairie, quelques soirées au bar ou au lac. Et à prendre soin du paternel depuis que ses frères sont partis. Virgile, l’aîné, s’est engagé dans la Légion. Jonas, le cadet, a disparu depuis des mois. Au grand soulagement du voisinage. Car leur nom seul suffit à terroriser le quartier.
Les Ischard : irresponsables, asociaux, récidivistes. Des teignes. Mais un jour de printemps, le téléphone sonne et, dans les rues aux noms de fleurs, la rumeur enfle….Un retour est annoncé. Pour le jeune Melvil, si admiratif de ses frères et pourtant si différent, l’heure est venue de choisir l’homme qu’il va devenir. – Roman d’apprentissage… Je vous en parle bientôt
- « L’éblouissement des petites filles » de Thimothée Stanculescu aux Editons Flammarion, 368 pages.
Justine vit seule avec sa mère à Cressac, un village où il ne se passe jamais rien. Sauf cet été, puisqu’Océane a disparu. Justine la connaît de vue, elles sont dans le même lycée. Sa disparition qui se prolonge donne à ce début d’été qui ne promettait qu’ennui une couleur trouble. Son absence réveille chez Justine une soif impérieuse de partir loin d’ici, seule ou avec un garçon – « comment font-elles, toutes les autres, pour trouver quelqu’un ? ».
- « Et d’un seul bras, la soeur balaie sa maison » de Cherie Jones aux Éditions Calmann-Lévy, traduction de Jessica Shapiro, 368 pages.
À Baxter’s Beach, à la Barbade, Wilma, la grand-mère de Lala, raconte l’histoire de la sœur à un bras. C’est un récit édifiant sur ce qui arrive aux filles qui désobéissent à leur mère et se rendent dans les tunnels malfamés de Baxter.
Une fois adulte, Lala vit chichement dans un cabanon de plage avec son mari, Adan, un voyou au charisme dévastateur. Quand un de ses cambriolages dans une villa de luxe voisine dérape, et qu’il est obligé de tuer un riche homme blanc pour s’en sortir, deux vies de femmes s’effondrent. Celle de la veuve de la victime, une insulaire partie de rien et ayant usé de ses charmes pour obtenir une meilleure vie. Et celle de Lala, victime collatérale, qui perd son nouveau-né dans la foulée de la violence d’Adan. Comment ces deux femmes que tout oppose, mais que le drame relie, vont-elles pouvoir se reconstruire ?
- « Mise à feu » de Clara Ysé aux Editions Grasset, 198 pages.
La nuit du réveillon, veille du nouveau millénaire, un incendie ravage la maison où vivent l’Amazone, ses deux enfants Gaspard et Nine, et Nouchka, leur pie.
Scène onirique et mystérieuse traversée par la peur, l’intuition d’un paradis perdu, la fuite.
Le lendemain, la petite Nine, six ans, narratrice du livre, et son frère Gaspard, huit ans, se réveillent chez leur oncle, l’inquiétant Lord. Hébergés pendant huit ans par cet homme menaçant au comportement imprévisible, tour à tour violent et distant, ils reçoivent tous les mois des lettres de l’Amazone qui leur annonce préparer la maison qui les accueillera un jour.
Devenus adolescents, ils nouent des amitiés qui leur permettent de s’évader de la prison du Lord pour fuir vers le Sud et retrouver leur mère. Après une si longue absence, qui retrouveront-ils ? Le rythme du roman s’emballe jusqu’à nous livrer la clé de ce rêve éveillé, qui charme tant par son émotion que par sa puissance d’évocation poétique, musicale, synesthésique.
- « Hors de toi » de Sandrine Girard aux Editions Calmann-Lévy, 248 pages.
Alice a cinq ans, six ans, sept ans, onze, quinze, vingt-cinq… Elle est brillante, elle est belle. Hypersensible, elle vit intensément chaque rencontre, chaque bain de mer, chaque instant. Et la rage bout en elle, une rage compacte qui explose par intermittences quand elle ne la retourne pas contre elle-même.
Ses parents ont divorcé. Ballottée d’un foyer à l’autre, elle endure la présence de ses beaux-parents en apnée : la cruauté d’une belle-mère jalouse, la violence d’un beau-père alcoolique. Nulle part, elle n’est en sécurité.
Ce qu’Alice cache dans la boulimie, l’auto-mutilation et derrière une soif de vivre inextinguible, ce sont les violences qu’elle a subies à onze ans. Son beau-père abuse d’elle et, toutes ces années, Alice se tait.