Pour ces deux jours des 18 et 19 mai, 7 livres ont attiré mon attention. Pour les sorties du 20 mai, je vous invite à vous diriger vers mon article qui en est expressément dédié.
Mardi 18 mai 2021
Littérature noire
« Mortel déjà-vu » de Melinda Leigh chez Amazon Crossing, 415 p., traduction de Louis Poirier.
Pendant plus de vingt-cinq ans, Bree Taggert, inspectrice à la brigade criminelle de Philadelphie, a refoulé l’histoire cauchemardesque du meurtre de sa mère suivi du suicide de son père. Mais le passé ressurgit le jour où sa sœur cadette, Erin, est assassinée de façon étrangement similaire : son mariage explosif se termine par des coups de feu, sous les yeux de témoins innocents. La seule différence ? Justin, le mari d’Erin, a disparu.
Bree connaît bien les histoires de violences conjugales, et les indices accusant son beau-frère ne lui semblent pas convaincants. Aidée de Matt Flynn, vieil ami de Justin et ancien shérif de la brigade canine, elle plonge dans les secrets de sa sœur afin de retrouver son assassin. Mais à mesure que l’enquête progresse, le danger se rapproche. À nouveau, Bree doit faire face à la mort. Mais cette fois, elle risque de ne pas s’en sortir.
Mercredi 19 mai 2021
Littérature blanche
« Réparer l’espace » d’Elsa Ballanfat aux Editions FrisonRoche Belles Lettres, collection Ex Nihilo, 176 p.
Ce récit répare les espaces dans lesquels disparaît le soi qui ne sait plus habiter son corps meurtri. Il répare la dissociation de notre être physique et psychologique. Elsa Ballanfat rappelle à la vie ces disparus, ces détruits qui flottent dans les interstices d’un corps qui se désagrège. Cette dépossession existentielle, cette fracture que le viol a causée, Elsa se propose d’y faire passer le faisceau de ses mots.
L’écriture reconquiert ici les failles, elle se réapproprie les mémoires. Elle recompose à travers les fragments d’existences féminines un espace : celui de la parole, celui de la traversée. Il s’agit de réparer ses espaces intérieurs, ce lien qui unit nos êtres et nos existences, et de s’y accrocher farouchement. Les corps ouvrent ces récits, libèrent les paroles et engagent un combat pour l’existence.
Elsa accompagne et amplifie ces chants pour que résonnent dans l’espace littéraire public ces silences réparés. Il n’est pas ici question de connaître et de réfléchir, mais bien de dire, d’ouvrir ces espaces à reposséder.
« Reims » de Yann Moix aux Editions Grasset, 270 p.
Reims constitue le deuxième volume de la tétralogie, ou du quatuor, que l’auteur a intitulé « Au pays de l’enfance immobile », dont Orléans paru en aout 2019 était le premier opus, et dont Verdun et Paris seront les troisième et quatrième.
Le narrateur s’est enfin échappé du cauchemar familial d’Orléans, il aspire aux plus grandes écoles pour « monter à Paris » mais ses résultats médiocres aux examens de mathématiques le font atterrir à l’Ecole supérieure de commerce de Reims, vécue par lui comme une relégation en troisième division.
Ici tout n’est qu’ennui, impuissance, obsession sexuelle jamais assouvie, dérive alcoolisée, débâcle progressive avec une petite bande de paumés masturbateurs et suicidaires qui tournent le dos à la compétition scolaire pour mieux affirmer leur différence.
Dans cette course à la vanité paradoxale de l’échec, avec les mots brandis contre les chiffres, la littérature contre les mathématiques, le déclassement contre le classement, la révolte contre le conformisme, la provocation contre la convocation, il va s’agir, à défaut de briller par le succès, de se distinguer par l’ignominie.
Sur cette bande de pieds nickelés travaillés par la chose littéraire qu’ils ne travaillent pas, plane l’ombre des « Simplistes » qui étaient parvenus à produire des œuvres belles et profondes à partir de Reims : René Daumal, Roger Gilbert-Lecomte, Roger Vailland et d’autres qui ont illuminé la revue littéraire Le Grand Jeu, là où leurs pâles successeurs ne sont plus capables que d’un tout petit jeu grinçant et misérable.
Reims, ou la prolongation de la haine de soi quand la haine des vôtres vous a définitivement incarcéré au « pays de l’enfance immobile »…
« Jamais je ne t’oublierai » de Marjolaine Solaro aux Editions Fayard, 306 p.
Guillaume vient de perdre subitement sa mère alors que sa femme est sur le point d’accoucher pour la troisième fois. Quand il monte dans le train pour retrouver sa famille après l’enterrement, il n’a qu’un souhait : dormir pour empêcher son esprit de le torturer.Diane, une journaliste aguerrie, part en Bretagne pour un reportage – et surtout pour fuir son couple, qui vacille. Ce voyage est une bouffée d’oxygène.
Tandis qu’ils prennent place à bord du TGV, leurs regards se croisent. Diane et Guillaume se connaissent, ils en sont certains. Si seulement ils parvenaient à se rappeler les circonstances de leur rencontre…
Elisabeth, sage-femme passionnée, débute sa garde à la maternité : la nuit s’annonce calme. Mais, dans ce service où la vie frôle parfois la mort, les choses peuvent s’emballer très vite.
Des héros qui nous ressemblent, unis par des liens invisibles.Le fil de la vie, tout simplement.
« Omissions » d’Emiliano Monge aux Editions Grasset, 464 p.
Peut-on échapper à son histoire familiale lorsqu’elle s’est construite au fil des mensonges et des trahisons ?
Le grand-père d’Emiliano Monge, lui-même petit-fils d’un Irlandais ayant fui l’Europe, sa femme et ses enfants pour s’installer en Amérique, a mis en scène sa propre mort. Carlos Monge McKey a placé un cadavre dans sa voiture, mis les mains de celui-ci sur le volant, desserré le frein et laissé le véhicule dévaler une carrière, puis exploser. Pendant plusieurs années, il a laissé croire à sa famille qu’il était décédé, jusqu’au jour de sa réapparition. Le père d’Emiliano, Carlos Monge Sánchez, traumatisé par la disparition puis par le retour de ce fantôme paternel, va pourtant lui aussi reproduire le schéma familial une fois devenu adulte. Jamais présent pour les siens, il est trop occupé par ses combats dans la guérilla aux côtés de Genaro Vázquez pour prévenir qu’il ne rentrera pas à la maison ou qu’il n’a pas embarqué dans l’avion du retour – alors que les siens l’attendent déjà à l’aéroport.
Et puis il y a Emiliano, qui au début de ce livre pense s’être lancé dans une enquête familiale mais qui se retrouve finalement plongé dans ses contradictions les plus intimes. Alors qu’il essaie de faire parler son père pour qu’il lui raconte ce qu’on lui a trop longtemps caché, il découvre que la tentation de la fuite à tout prix, cette aspiration à tout abandonner pour retrouver sa liberté, à chaque instant, est ancrée en lui comme chez tous les hommes de la famille. En imaginant se construire contre ces figures paternelles, il réalise qu’il n’échappera pas à la tradition héréditaire, chez les Monge on vit par omissions pour mieux fuir ceux que l’on aime.
En entrelaçant le journal de son grand-père, les entretiens menés avec son père et le roman de sa famille en train de s’écrire, Emiliano Monge nous embarque ainsi dans le récit à peine croyable de sa généalogie. Omissions progresse de rebondissement en rebondissement jusqu’au cœur de l’histoire familiale et de la quête probablement la plus difficile pour l’auteur : celle de sa véritable identité.
Témoignages, documents & essais
« Devenir Hitler : La fabrique d’un nazi » de Thomas Weber aux Editions Armand Colin, 496 p.
Comment et pourquoi Hitler, parti de rien, a-t-il réussi à s’imposer sur la scène politique allemande ? Cet ouvrage d’un grand spécialiste de la Seconde Guerre mondiale et d’Adolf Hitler, dépeint six années fatidiques durant lesquelles un médiocre soldat opportuniste est devenu un démagogue redoutable et a fondé une idéologie qui allait nourrir le parti nazi et le porter à la tête de l’Allemagne en 1933.
Ce portrait original et captivant donne à voir la genèse d’un dictateur, au sein d’un monde bouleversé par la Grande Guerre et éclaire d’un jour nouveau ces années durant lesquelles se sont construits la pensée, l’image, l’habileté politique et le pouvoir de Hitler. Loin des clichés, documenté et intelligent, l’ouvrage de Thomas Weber nous propose de découvrir la tragique métamorphose de celui qui allait bouleverser le monde à jamais.
Littérature noire
« Une cathédrale à soi » de James Lee Burke aux Editions Rivages Noir, 448 p., traduction de Christophe Mercier.
Pris dans l’une des rivalités familiales les plus anciennes et les plus sanglantes de la Louisiane, le détective Dave Robicheaux doit affronter l’adversaire le plus terrifiant qu’il ait jamais rencontré : un assassin surhumain qui voyage dans le temps.