Blessé au cours d’une fusillade entre Russes et séparatistes, Charles Kaplan, photographe de guerre, se retrouve dans un hôpital de Kiev. L’homme qui l’accompagnait est mort et son cadavre s’est mystérieusement volatilisé. Tout comme sept autres corps…Kaplan se lance dans une enquête effarante hantée par l’ombre d’un homme : Terek Smalko, chirurgien auréolé d’une légende noire. Et par deux mots sibyllins : Fabrika böbrekler, « l’usine à reins ». Un thriller remarquablement orchestré et documenté qui nous plonge, de Prague à Bucarest, de Shanghai à Ankara, au cœur d’une réalité aussi terrifiante que vraisemblable.
C’est un thriller que j’avais envie de lire depuis un bon bout de temps ; depuis sa sortie à vrai dire. Et le résultat est que je n’ai pas été du tout déçue pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, j’ai beaucoup apprécié le thème abordé même s’il est loin d’être réjouissant : le trafic d’organes. C’est la première fois que je découvre un thriller qui y est principalement consacré. A côté, il est aussi question de la guerre qui a opposé l’Ukraine et la Russie ; guerre dont les médias européens ont très souvent fait abstraction. Le sujet est traité de manière « crue » et sans ambages mais surtout, sans fioritures. On peut sentir que l’auteur s’est bien renseigné afin de ne pas écrire un énième livre traitant de ce problème.
Ensuite, j’ai apprécié que cette enquête soit menée par un photoreporter, contrairement aux thrillers classiques qui mettent en scène un ou plusieurs membres des forces de l’ordre. Ici, Charles Kaplan, en plein reportage en Ukraine, veut aller au bout de la triste réalité découverte que représente le trafic d’organes. On voyage rapidement à travers plusieurs pays mais chaque fois avec le même constat : l’homme est lui-même un loup pour l’homme. Alors que des riches mettraient toute leur fortune sur la table pour obtenir un organe sain peu importe sa provenance, les pauvres, eux, leur en céderaient un à la moindre occasion (quelle que soit la méthode, le lieu et les acteurs médicaux qui y procèderont) en échange d’un peu d’argent pour vivre, voire survivre.
L’écriture est fluide et sans envolée lyrique. Cela peut sembler parfois choquant mais c’est simplement la réalité qui y est dépeinte. Les personnages sont décrits de telle sorte qu’on ne peut que s’attacher aux bons et détester les mauvais. Grâce aux traits de caractère développés pour le héros, on ne peut être que sous son charme.
Selon moi, il serait facile de transposer cette histoire en film ou série, tant l’auteur a déjà fortement préparé le travail d’un potentiel scénariste. A certains moments, c’est comme si nous, lecteurs, étions au côté du héros principal dans sa quête effrénée, risquant de se mettre lui et sa famille en danger, en vue de redonner de la dignité aux laissers pour compte de cet horrible trafic, qu’est le trafic d’organes. Le pire, j’ai envie de dire, est que la réalité doit être encore plus atroce que ce que nous, européens à l’abri, nous pouvons réellement imaginer. C’est pourquoi ce livre est, selon moi, un très bon livre choc, certes imaginaire, mais réveilleur de consciences.